En 1907, les vignerons du midi de la France s’étaient révoltés contre le vin chimique, qui leur faisait concurrence. Quand ils manifestèrent à Béziers, on voulut envoyer contre eux les soldats du 17e régiment d’infanterie de ligne. Ceux-ci, originaires de la région, étaient de proches parents des manifestants.
Ils se mutinèrent le 19 juin 1907.
La mutinerie vaudra au régiment de rejoindre sans délai les bataillons disciplinaire d’Afrique du Nord.
En hommage à ses valeureux soldats, Montéhus écrivit « Gloire au 17ème », chanson qui assura sa notoriété (elle passe en fond sonore).
De son vrai nom Gaston Mordachée Brunschwig, Montéhus est né dans le 10éme arrondissement de Paris le 9 juillet 1872. Il est l’aîné d’une famille d’ouvriers de vingt deux enfants !
Montéhus a été élevé dans un contexte post-communard ce qui explique son orientation politique à gauche (il prétendait que son père avait fait partie des insurgés de 1871).
Il débute très tôt dans la chanson, à l’âge de douze ans, déjà sous le nom de Montéhus.
Il est engagé à la fin de l’année 1901 aux Ambassadeurs, où son répertoire provoque un scandale. Les hommes de Drumont distribuent des tracts contre « le juif Brunswick » qui « éructe des infamies à l’adresse des chefs de l’armée française », et provoquent des bagarres.
Édouard Drumont (Paris, 3 mai 1844 – 3 février 1917), journaliste, fondateur du journal La Libre Parole, antidreyfusard, nationaliste et antisémite.
Dans ses chansons, Montéhus s’oppose à la guerre, à l’exploitation capitaliste, à la prostitution, à la misère, à l’hypocrisie religieuse :
La grève des Mères fut interdite par décision de justice en octobre 1905 et Montéhus condamné pour « incitation à l’avortement ».
N’insultez pas les filles
Qui s’vendent au coin des rues
N’insultez pas les filles
Qu’la misère a perdues
S’il y avait plus d’justice
Dans notre société
On n’verrait pas tant d’vices
S’étaler su’ l’pavé
En 1907, il ouvre « Le Pilori de Monthéus » sur le Boulevard de Strasbourg, dans le 10ème. Il y déclame son répertoire (chansons, monologues et pièces), devant un public nombreux.
Parmi les spectateurs l’on remarque Lénine, alors exilé France, qui l’admire.
En 1914 il compose « La guerre finale » une parodie de L’Internationale :
Avec les pacifistes, anarchistes ou antimilitaristes censés être réfractaires à la mobilisation, Montéhus se rangent sous le drapeau tricolore face à l’agression allemande.
En 1919, il revient à ses premières convictions avec La Butte rouge, son chef d’oeuvre.
Chanson anti-guerre par excellence qui fait référence à la « butte Bapaume », un sanglant épisode sur le front de Champagne, pendant la Première Guerre mondiale.
Il traverse alors une longue période de disgrâce.
À l’avènement du Front populaire, à l’âge de 64 ans, Montéhus est de nouveau sur le devant de la scène avec Le décor va changer, Vas-Y Léon !« , Le Cri des grévistes, L’Espoir d’un gueux, chansons dans lesquelles il soutient le Front populaire et Léon Blum.
En 1947, à plus de soixante-dix ans, il reçoit la Légion d’honneur des mains de Paul Ramadier.
Oublié de tous, seulement soutenu par sa famille, il meurt cinq plus tard dans le 15éme arrondissement le 31 décembre 1952. Ses cendres reposent au Père-Lachaise.
Gloire au 17ème
Le refus était un devoir
On ne doit pas tuer ses père et mère
Pour les grands qui sont au pouvoir
Soldats, votre conscience est nette
On n´se tue pas entre Français
Refusant d´rougir vos baïonnettes
Petits soldats, oui, vous avez bien fait
{Refrain:}
Salut, salut à vous
Braves soldats du 17ème
Salut braves pioupious
Chacun vous admire et vous aime
Salut, salut à vous
A votre geste magnifique
Vous auriez en tirant sur nous
Assassiné la République
Comme les autres, vous aimez la France
J´en suis sûr même, vous l´aimez bien
Et sous le pantalon garance
Vous êtes restés des citoyens
La patrie c´est d´abord sa mère
Celle qui vous a donné le sein
Et vaut mieux même aller aux galères
Que d´accepter d´être son assassin
{au Refrain}
Espérons qu´un jour viendra en France
Où la paix, la concorde règnera
Ayons tous au cœur cette espérance
Que bientôt ce grand jour viendra
Vous avez j´té la première graine
Dans le sillon d´ l´Humanité
La récolte sera prochaine
Et ce jour-là vous serez tous fêtés
{au Refrain}
REMARQUABLE… Je découvre les oeuvres de ce poète-chansonnier grâce à toi, son âme écorchée vive et sa parole qui claque au vent, bannière immatérielle et ô combien perceptible par les coeurs révoltés. Toujours la même histoire d’escroquerie et de violences initiées par ceux qui ensuite montent sur leurs grands chevaux. Une très belle page sur ton blog Gérard. J’espère que vous allez tous au mieux… Mes pensées pour chacun, avec de gros bisous. Cendrine
Excellent article, enrichissant. Merci
Le plaisir de relire cet article émouvant, merci Gérard. Bonne soirée, gros bisous.
Cendrine
Merci de nous offrir et de partager cette culture populaire.
isa