Elle fréquentait la rue Pigalle
Elle sentait le vice à bon marché
Elle était toute noire de péchés
Avec un pauvre visage tout pâle
Pourtant y’avait dans le fond de ses yeux
Comme quelque chose de miraculeux
Qui semblait mettre un peu de ciel bleu
Dans celui tout sale de Pigalle.
Il lui avait dit: « Vous êtes belle. »
Et d’habitude, dans ce quartier-là,
On dit jamais les choses comme ça
Aux filles qui font le même métier qu’elle;
Et comme elle voulait se confesser,
Il la couvrait toute de baisers,
En lui disant: « Laisse ton passé,
Moi, je vois qu’une chose, c’est que tu es belle. »
Y’a des images qui vous tracassent;
Et quand elle sortait avec lui,
Depuis Barbès jusqu’à Clichy
Son passé lui faisait la grimace.
Et sur les trottoirs plein de souvenirs,
Elle voyait son amour se flétrir,
Alors, elle lui demanda de partir,
Et il l’emmena vers Montparnasse.
Elle croyait recommencer sa vie,
Mais c’est lui qui se mit à changer,
Il la regardait tout étonné,
Disant: « Je te croyais plus jolie,
Ici, le jour t’éclaire de trop,
On voit tes vices à fleur de peau,
Vaudrait peut-être mieux que tu retournes là-haut
Et qu’on reprenne chacun sa vie. »
Elle est retournée dans son Pigalle,
Y’a plus personne pour la repêcher,
Elle a retrouvée tous ses péchés,
Ses coins d’ombre et ses trottoirs sales.
Mais quand elle voit des amoureux
Qui remontent la rue d’un air joyeux,
Y’a des larmes dans ses grands yeux bleus
Qui coulent le long de ses joues toutes pâles.
Raymond Asso a écrit les paroles de « Elle fréquentait la rue Pigalle » en 1939.
Depuis l’assassinat de Louis Leplée en 1936, Edith Piaf n’a plus de manager. A partir de 1937, Raymond Asso devient le compagnon d’Edith et s’occupe de sa carrière. Il l’éloigne de la rue Pigalle et de ses mauvaises fréquentations et l’installe dans un hôtel paisible de la butte Montmartre. Sont interdits de visite tous ceux qui peuvent avoir une mauvaise influence sur elle, y compris sa famille.
Raymond Asso lui écrit de nombreux textes dont « Le Fanion de la Légion », « J’en connais pas la fin », « C’est l’histoire de Jésus », sur des musiques de Marguerite Monnot ainsi que « Le grand voyage du pauvre nègre » sur une musique de René Cloarec, « Elle fréquentait la rue Pigalle » (composition de Louis Maîtrier), mais aussi « Mon amant de la coloniale », « Un jeune homme chantait », « C’est toi le plus fort », « Browning », « Le contrebandier », « Paris-Méditerranée » (1938), « C’est lui que mon cœur a choisi » (1938), « Je n’en connais pas la fin », « Les deux copains »…
Edith Piaf
ELLE FRÉQUENTAIT LA RUE PIGALLE
Paroles: R. Asso, musique: L. Maitrier, 1939
Elle fréquentait la rue Pigalle
Elle sentait le vice à bon marché
Elle était toute noire de péchés
Avec un pauvre visage tout pâle
Pourtant y’avait dans le fond de ses yeux
Comme quelque chose de miraculeux
Qui semblait mettre un peu de ciel bleu
Dans celui tout sale de Pigalle.
Il lui avait dit: « Vous êtes belle. »
Et d’habitude, dans ce quartier-là,
On dit jamais les choses comme ça
Aux filles qui font le même métier qu’elle;
Et comme elle voulait se confesser,
Il la couvrait toute de baisers,
En lui disant: « Laisse ton passé,
Moi, je vois qu’une chose, c’est que tu es belle. »
Y’a des images qui vous tracassent;
Et quand elle sortait avec lui,
Depuis Barbès jusqu’à Clichy
Son passé lui faisait la grimace.
Et sur les trottoirs plein de souvenirs,
Elle voyait son amour se flétrir,
Alors, elle lui demanda de partir,
Et il l’emmena vers Montparnasse.
Elle croyait recommencer sa vie,
Mais c’est lui qui se mit à changer,
Il la regardait tout étonné,
Disant: « Je te croyais plus jolie,
Ici, le jour t’éclaire de trop,
On voit tes vices à fleur de peau,
Vaudrait peut-être mieux que tu retournes là-haut
Et qu’on reprenne chacun sa vie. »
Elle est retournée dans son Pigalle,
Y’a plus personne pour la repêcher,
Elle a retrouvée tous ses péchés,
Ses coins d’ombre et ses trottoirs sales.
Mais quand elle voit des amoureux
Qui remontent la rue d’un air joyeux,
Y’a des larmes dans ses grands yeux bleus
Qui coulent le long de ses joues toutes pâles.
Sources.
http://www.lehall.com/consultez-l-histoire/artistes/raymond-asso-le-pygmalion
Tellement d’émotion dans ce texte si fort!!!
Il est brut, poignant, ardent, sans concession… l’âme de Paris qui déambule sur les pavés… et ce portrait de femme…
Merci de cet article rythmé par un superbe choix de photos, gros bisous Gérard et plein de pensées pour vous tous, à très bientôt
Cendrine
merci Cendrine pour tes commentaires si précieux et généreux. Je me délecte toujours à te lire.
gérard
Je peux tout à fait comprendre votre parti-pris de donner à voir le texte de cette chanson admirable dans sa version « littéraire » (ou correcte, je ne sais trop comment dire à la vérité). Il n’empêche, si je puis me permettre, ce qui manque à votre retranscription, ce sont les élisions dont est parsemé le texte, lesquelles participent grandement à la force de la chanson. Aucune d’entre elles, en effet, n’est gratuite, à la différence de celles qu’on trouve dans la quasi-totalité des chansons depuis plus de trente ans, qui ne sont là la plupart du temps que par paresse, pour épargner à leurs auteurs l’effort d’avoir à chercher d’autres mots permettant de ne pas avoir des syllabes en trop.
Pour pouvoir être chanté sur la très belle musique de Louis Maitrier, le texte de Raymond Asso s’écrit en fait comme suit :
Ell’ fréquentait la rue Pigalle,
Ell’ sentait l’vice à bon marché,
Elle était tout’ noir’ de péchés
Avec un pauvr’ visag’ tout pâle.
Pourtant y’avait dans l’fond d’ses yeux
Comm’ quequ’ chos’ de miraculeux
Qui semblait mettre un peu d’ciel bleu
Dans celui tout sal’ de Pigalle.
Il lui avait dit : « Vous êt’s belle. »
Et d’habitud’ dans c’quartier-là
On dit jamais les chos’s comm’ ça
Aux fill’s qui font l’mêm’ métier qu’elle ;
Et comme ell’ voulait s’confesser
Il la couvrait tout’ de baisers
En lui disant : « Laiss’ ton passé,
Moi j’ vois qu’un’ chos’, c’est qu’tu es belle. »
Y’a des imag’s qui vous tracassent ;
Et quand ell’ sortait avec lui
Depuis Barbés jusqu’à Clichy
Son passé lui f’sait la grimace.
Et sur les trottoirs pleins d’souv’nirs
Ell’ voyait son amour s’flétrir,
Alors ell’ lui d’manda d’partir
Et il l’emm’na vers Montparnasse.
Ell’ croyait r’commencer sa vie,
Mais c’est lui qui s’mit à changer,
Il la r’gardait tout étonné
Disant : « J’te croyais plus jolie,
Ici le jour t’éclair’ de trop,
On voit tes vic’s à fleur de peau,
Vaudrait p’t’êtr’ mieux qu’tu r’tourn’s là-haut
Et qu’on reprenn’ chacun sa vie.
Elle est r’tournée dans son Pigalle,
Y’a plus personn’ pour la r’pêcher,
Elle a r’trouvé tous ses péchés,
Ses coins d’ombre et ses trottoirs sales.
Mais quand ell’ voit des amoureux
Qui r’mont’nt la rue d’un air joyeux,
Y’a des larm’s dans ses grands yeux bleus
Qui coul’nt le long d’ses joues tout’s pâles.