D’Alembert est recueilli par « la femme du vitrier Rousseau »

D’ Alembert par le portraitiste Maurice-Quentin de La Tour.
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Paris 16 novembre 1717, abandonné sur les marches de la chapelle Saint-Jean-Le-Rond par sa mère la baronne de Tencin, le futur mathématicien et philosophe  sera recueilli par l’épouse d’un vitrier, madame Rousseau.

La chapelle Saint-Jean-le-Rond jouxte la cathédrale Notre-Dame de Paris (en haut et à gauche de l’image) sur le plan de Truschet et Hoyau (c.1550). Plan_de_Paris_vers_1550_hotel-Dieu

La mère de d’Alembert, Claudine-Alexandrine-Sophie Guérin de Tencin, naît le 27 avril 1682 à Grenoble. Après vingt-deux années passées de force au couvent, elle s’installe à Paris en 1711,  elle est introduite dans les milieux du pouvoir par ses liens avec le cardinal Dubois.

Portrait présumé de Madame de Tencin âgée.Aved_Tencin

Courtisane et femme de lettres elle ouvre un salon célèbre appelé le « bureau d’esprit ».

Elle collectionne les amants : Richelieu, d’Argenson, des maréchaux, des cardinaux, des hommes de lettres, des anonymes, Charles-Joseph de la Fresnaye qui se suicide dans son salon après avoir laissé un billet l’accusant de l’avoir trahi, ce qui lui vaudra un séjour de quelques semaines à la Bastille,

Madame de Tencin décède  le 4 décembre 1749 à Paris sans jamais avoir revu son fils.

Le bébé qu’elle a abandonné sur les marches de la chapelle Saint-Jean-le-Rond est d’abord placé à l’hospice des Enfants-Trouvés, appelé aussi « Maison de la couche ». Fondé en 1638 et installé sur le parvis de Notre Dame, l’établissement recueille les nouveaux-nés et les enfants en bas âge.

Comme le veut la coutume, l’horphelin est nommé du nom du saint protecteur de la chapelle et devient Jean Le Rond.

Alors que madame de Tencin est enceinte  de six mois, son père le chevalier Louis Camus Destouches reçoit l’ordre de se rendre à la Martinique.

Lorsqu’il est de retour à Paris, six mois après la naissance du bébé, il demande à sa maitresse où elle a mis l’enfant en nourrice. Embarrassée elle finit par avouer la triste vérité.

Destouches ne perd pas un moment pour aller récupérer l’enfant qu’il  place dans une famille d’adoption. Par la suite il veillera secrètement à son éducation en lui accordant une pension et en le visitant quelquefois chez sa nourrice, madame Rousseau.

Une autre hypothèse subsiste sur la véritable identité du père : il pourrait s’agir du duc Léopold Philippe Charles-Joseph d’Arenberg (1690-1754). Dans ce cas Louis-Camus Destouches aurait perçu des fonds puis aurait fait  office de tuteur.
Cette hypothèse expliquerait pourquoi
  Jean le Rond est devenu par la suite Jean le Rond D’Alembert. Toutefois aucune preuve de cette paternité n’a été découverte par les historiens.

On ne peut évoquer l’enfance de D’Alembert, ni même sa vie d’adulte, sans mentionner « la femme du vitrier Rousseau », la nourrice à laquelle il a toujours été très attaché, et chez laquelle il a habité pendant quelque trente ans.

Lorsqu’elle  recueille Jean Le Rond en 1717,  Gabrielle Ponthieux, est  l’épouse du maître vitrier Jean Baptiste Gérard. Devenue veuve en 1724, la nourrice de D’Alembert se marie, en 1726, avec le maître vitrier Alexandre Nicolas Rousseau.

À partir de 1728, c’est au numéro 24 actuel de la rue Michel-le-Comte (3éme arr.) que les Rousseau ont toujours habité.
rue

Gabrielle décède le 10 mars 1775 . Elle a 92 ans, c’est d’Alembert lui-même qui nous le précise le 22 juillet 1776 :

Ah ! ma pauvre nourrice ! vous qui avez eu tant de soin de mon enfance, qui m’avez mieux aimé que vos propres enfans ; vous avec qui j’ai passé vingt-cinq années, les plus douces de ma vie ; vous que j’ai quittée pour obéir à un sentiment plus tendre ; vous que j’aurais dû ne quitter jamais ; vous que j’ai perdue à quatre-vingt-douze ans ; pourquoi n’existez-vous plus ! j’irois demeurer avec vous, irois fermer vos yeux, ou mourir entre vos bras ; et j’aurois du moins encore, pendant quelques momens, la consolation de penser qu’il est quelqu’un au monde qui me préfère à tout le reste.

D’ Alembert meurt à Paris le 29 octobre 1783; huit ans après sa nourrice.

Jusqu’à sa mort, il continue ses travaux scientifiques et disparaît au faîte de sa célébrité, prenant ainsi une revanche éclatante sur sa naissance. Il est enterré sans cérémonie religieuse.

Couverture de l’Encyclopédie de Diderot et d’Alembert.1

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